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La mélodie du cœur

Dernière mise à jour : 14 avr. 2021


Cet article ne devait parler que des J’ilol, non ce n’est pas une nouvelle façon d’exprimer un éclat de rire, finalement ces recherches m’ont mené bien plus loin…


Depuis que je suis au Mexique, j'apprends à me reconnecter avec des principes basiques du quotidien, la vie de jeune citadine Française du XXIème siècle m'ayant cruellement éloignée de tout ce qu'on (l'église) a jugé irrationnel au fil du temps. C'est pourquoi je vais aujourd'hui vous parler, à travers la sagesse des guérisseurs du monde, de quelque chose que tout le monde possède... Le cœur. La première fois où je suis allée à Chamula j’avais l’impression de visiter un pays magique. C’est comme un coup de foudre, on y met les pieds et on comprend que ça va nous changer la vie. Kiki Suárez, artiste résidente à San Cristóbal de las Casas depuis les années 70 en parle parfaitement :

"Chamula ressemblerait à n'importe quel village moderne de n'importe quelle autre partie du Mexique s'il n'y avait pas les Chamula en habits traditionnels, et cette église.. c’est la seule au monde qui me fait ressentir de la vénération, de la magie et du mysticisme, la seule église où mon âme tremble. J'imagine que le jour où j'arriverai au purgatoire ce sera comme ça; des centaines et des centaines de bougies flottant dans un espace sombre [...]

Dans cette église, ils jouent le bolonchón (musique et danse traditionnelle) que j'aime tant, ils y allument du copal et des gens prient; récitant en murmurant dans une langue qui m'est inconnue, un chant si spécial qui me fait ressentir qu'ici nous sommes à Chamula et nulle part ailleurs sur la planète. Cet endroit est si unique que sa magie pénètre mes os."


Le terme J’ilol, désigne la personne qui a reçu des divinités célestes et à travers ses rêves, le pouvoir de percevoir via les pulsations cardiaques. Le flux des artères du patient “parle” au guérisseur lui transmettant la raison de ses maux. La musique des battements de son cœur dans son poignet lui murmure aussi les actions qui doivent être entreprises pour l’aider à guérir.


On m’a souvent parlé des J’iloles, les guérisseurs qui officient dans cette merveilleuse "église" mais je les ai toujours vus comme une attraction touristique, plus que comme de vrais médecins. Il faut dire que les Chamula savent si bien gérer le tourisme qu'il ne me semblait pas illogique qu'ils tentent d’envoûter un peu plus les visiteurs. Finalement, j’ai connu la Abuelita, qui est elle-même curandera (guérisseuse), j'ai donc décidé de laisser tomber les préjugés et de m'ouvrir à l'extra-ordinaire, car, pourquoi pas? (D’ailleurs, notre chère abuelita joue son propre rôle de J'ilol dans ce clip de rock en Tzotzil du groupe Vayijel).


" Cette médecine ne peut être enseignée, elle doit nous venir de la même manière qu’à nos ancêtres [...] Dieu m’a fait ce don à travers mes rêves parce qu'il ne permet pas que les connaissances de nos ancêtres soient perdues. "

Évidemment l’arrivée des Espagnols à un peu altéré l’histoire :


" Lorsque Jésus-Christ est passé sur la Terre, il a souligné la nécessité de faire partie de ceux qui aident à guérir [...] Il n'a jamais rien demandé en retour et ses remèdes étaient basés sur la force spirituelle. Quand il est allé au paradis, il a fait des J’iloles ses représentants. "


Comme Jésus ne faisait pas payer pour ses miracles, les J’iloles doivent faire de même, néanmoins ils acceptent volontiers les dons. Ce qui me faisait douter de l’authenticité des “guérisseurs touristiques”, qui ne sont, bien entendu, pas gratuits. Traditionnellement le mandat offert par les divinités est un service et non un moyen d'enrichissement. Le tourisme a quelque peu déformé la tradition ou entraîné l'apparition de charlatans, quien sabe.


Voici des témoignages pour mieux comprendre qui sont les J'iloles :

" Je sais guérir. J'avais 6 ans quand j'ai commencé à rêver. Je rêvais tous les soirs. Une femme et un homme venaient dans mes rêves et m’enseignaient à guérir. Ils sont venus d'en haut, de là où le soleil s’élève. Ils m'ont tout enseigné parce que le Jtolik, c'est-à-dire Dieu, m’avait désigné. "

" Quand j'avais huit ans environ, j'ai commencé à rêver pour devenir J’ilol, et même si je rêvais sans cesse, à cet âge-là je ne savais pas ce que cela signifiait. Je t'entendais une voix me dire :

"Pulsame (prends mon pouls) s'il te plaît,

Sens ce que dit mon sang et explique-le-moi."



" Quand je prenais le pouls dans les rêves, je percevais quelle maladie affligeait le patient et ce qui devait être fait pour qu’il retrouve la santé; mais ici sur la terre, là où nous touchons le sol, je ne savais pas comment écouter le pouls, comment le comprendre. "


Dit de cette façon, à moins d'être croyant ça a simplement l’air d’une jolie histoire, mystique et plutôt irréelle, pourtant la prise du pouls n’est pas un geste exceptionnel car tous les médecins généralistes que nous connaissons le prennent. Je me suis donc renseignée sur l’histoire de cette pratique dans différentes médecines traditionnelles, de pays distincts et d’époques éloignées. Il s’avère que c’est une méthode plutôt internationale, intemporelle. Pour n’en citer qu’une, je voudrais parler d’un concept de l’ayurveda, une médecine traditionnelle d’Inde :